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diplomatie fr
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diplomatie fr
Les révoltés du Quai d’Orsay
FRANCE INFO - 07:48
FRANCE INFO - 07:48
C’est le coup de colère de diplomates français. Dans une tribune publiée hier dans le journal le Monde, plusieurs d’entre eux critiquent la politique extérieure menée par Nicolas Sarkozy. Même si cette tribune est anonyme, c’est un fait suffisamment rare pour être souligné. Ces diplomates décrivent leur malaise.
Les révoltés du Quai d’Orsay L’enquête de Sébastien Baer (4'51")
Quand ils sont en activité, ces serviteurs de l’Etat sont soumis au devoir de réserve. Ils risquent de graves sanctions s’ils prennent la parole. Alors ce sont ceux qui ont quitté leur fonction qui ont accepté de s’exprimer, de dire leur amertume, leur frustration. Comme les militaires, comme les magistrats, les diplomates s’agacent de la façon dont ils sont traités par Nicolas Sarkozy. Ils ont le sentiment d’être marginalisés, mis sur la touche. " J’ai l’impression que l’image de l’ambassadeur Ferrero-Rocher est encore très répandue. A l’Elysée, on pense sans doute que le quai d’Orsay n’est pas forcément indispensable sinon pour accueillir les voyages et les organiser, mais quand il s’agit de prendre une décision, l’équipe de la présidence suffit", constate Loïc Hennekinne, ancien ambassadeur de France en Indonésie, au Japon, au Canada et en Italie. La politique étrangère serait donc concentrée entre les mains du secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant, et du conseiller diplomatique de Nicolas Sarkozy, Jean-David Levitte.
MANQUE DE CONSIDÉRATION
Les diplomates français reprochent à Nicolas Sarkozy son amateurisme et ses coups médiatiques incompatibles avec la diplomatie. Ils pointent aussi un manque de cohérence et des choix faits en dépit du bon sens. Exemple : le cas de la française Florence Cassez, condamnée au Mexique à 60 ans de prison. C’est une affaire que connaît bien Jacques-Alain de Sédouy. Il a été ambassadeur de France au Mexique. "On est dans une société compassionnelle, donc il faut montrer la compassion, aller vers les victimes. On manifeste sa compassion à l’égard des parents de Florence Cassez, de son entourage et d’elle-même et on le fait publiquement parce qu’on pense que cela va plaire au public. Mais c’est exactement le contraire de ce qu’il faut faire parce que je connais bien les Mexicains, ils sont extraordinairement susceptibles. Et c’est leur droit, ils sont fiers du Mexique et je ne crois pas qu’en France on aurait supporté d’être traités comme nous on a traité les Mexicains. En fait, on va à l’encontre de l’objectif recherché et on dresse contre soi l’opinion publique de l’autre pays".
De la même façon, les diplomates critiquent la gestion de la crise africaine par l’Élysée. "Vingt-quatre heures après, on prend acte de la transition démocratique, cela veut dire que c’est une situation qui ne nous satisfait pas complétement, on n’a pas trouvé les mots qu’il fallait. On aurait attendu une vraie déclaration pour dire combien la France accompagnait ces mouvements, sans donner l’impression de critiquer les gouvernements ou les chefs d’État en place. Mais ce discours a manqué. Où sont les valeurs de la France ?" s’interroge Yves Aubin de la Messuzière, ambassadeur en Tunisie de 2002 à 2005.
Nicolas Sarkozy manque de considération à l’égard des diplomates C’est ce qu’estime Jacques-Alain de Sédouy. Il a été ambassadeur de France en Jordanie, au Mexique et au Danemark (5'03")
AFRIQUE : DIPLOMATIE DÉLICATE
C’est justement en Afrique que la diplomatie française semble la plus fragile. D’après l’écrivain et ancien ambassadeur au Sénégal, Jean-Christophe Rufin, la France est enfermée dans une politique ancienne, d’un autre âge. Ce seraient les réseaux et la Françafrique qui détermineraient les choix diplomatiques. "Dans la politique africaine, quand vous essayez d’avoir une politique normale, ça marche, ça marche très bien même. Jusqu’au jour où la Françafrique se manifeste et où nos compromissions sont évidentes, et ce jour-là plus personne ne nous prend au sérieux, puisque tout le monde comprend que le diplomate qu’ils ont en face d’eux est court-circuité par le pouvoir local qui obtient ce qu’il souhaite par des voies qui lui sont propres. Donc tout cela affaiblit la crédibilité des diplomates sur place". La portée de la voix de la France diminue donc à l’étranger, avec pour conséquence, ce malaise chez les diplomates. "Ils ont le sentiment d’une marginalisation et qu’ils sont moins écoutés qu’autrefois dans les pays dans lesquels ils sont accrédités, parce que leur poids dans le jeu multilatéral se trouve diminué" explique Bertrand Badie, professeur de relations internationales à science po paris. Pour préserver le rayonnement de la France à l’étranger, les diplomates réclament une vision à long terme. "Seule façon", disent-ils, de sortir la diplomatie française de l’impasse.
Le malaise des diplomates français, expliqué par Bertrand Badie, professeur de relations internationales à l’IEP Paris Il (4'35")
Enquête : Sébastien Baer
Re: diplomatie fr
La diplomatie française n'est plus qu'un château de sable
LEMONDE | 23.06.11 | 13h52 • Mis à jour le 23.06.11 | 14h32
Sur les planches de Deauville, accueillant le G8 hier, sur la Croisette demain pour le G20, il est facile de jouer une pièce de théâtre et de laisser croire que la France a les moyens de ses grandes ambitions déclaratoires.
Nous aimerions applaudir sans réserve à cette séduisante mise en scène. Il y a tant à faire pour gagner les paris d'une mondialisation plus juste et plus humaine. Mais, si on passe dans les coulisses, les illusions s'évanouissent. Le château de sable de la diplomatie française est proche de s'écrouler à la prochaine marée...
Alain Juppé avait exprimé en juin 2010, dans une tribune partagée avec Hubert Védrine, ex-ministre des affaires étrangères, la crainte que "l'instrument (diplomatique) soit sur le point d'être cassé". Il vit maintenant tous les jours l'état dramatique du ministère. Saura-t-il convaincre le gouvernement d'inverser la tendance pour assurer au ministère des affaires étrangères les moyens des ambitions affichées ?
La diplomatie de crise, des communiqués et des coups médiatiques est la plus visible. Mais, à l'opposé de la diplomatie "de perron", la diplomatie de l'influence et la coopération souffrent gravement. La France est en train de perdre la bataille du soft power, qui se joue sur le terrain et à long terme.
Se vanter dans les discours officiels de disposer du deuxième réseau diplomatique après les Etats-Unis est de la poudre aux yeux. Année après année, ce réseau s'appauvrit et devient une coquille vide. Qu'est-ce qu'une politique d'influence sans hommes et sans femmes pour la faire vivre sur le terrain ? Après avoir réduit ses effectifs de 10 % entre 1994 et 2005, le petit ministère des affaires étrangères (15 500 agents au total) doit en sacrifier deux mille de plus d'ici 2013, au titre de la révision générale des politiques publiques (RGPP).
Tandis que les chancelleries et les consulats manquent de personnels essentiels, ceux du secteur culturel et de la coopération, servant de principale variable d'ajustement, diminuent comme peau de chagrin... Au même moment pourtant, de nouveaux emplois "honorifiques" et très coûteux sont donnés à des amis(e) s politiques, dont l'action comme ambassadeurs itinérants ou thématiques est aussi floue que les missions, ou qui font fi des règles déontologiques s'imposant aux diplomates en continuant de mener leur carrière politique nationale.
D'un débat budgétaire à l'autre, les gouvernements successifs ne disent pas la vérité et le Parlement se voile la face. Deux des 5 milliards d'euros dont est "crédité" le Quai d'Orsay ne font en fait que transiter pour faire face à nos engagements internationaux, tels que la contribution au Fonds de développement européen (FED) ou celle destinée aux opérations de maintien de la paix des Nations unies, qui augmentent chaque année.
Le budget effectif du ministère n'est que de 3 milliards environ. Subissant des coupes drastiques, il est largement insuffisant pour financer un réseau mondial et conduire une politique d'influence ambitieuse.
Ce que l'on appelle la diplomatie culturelle, universitaire et scientifique a été sévèrement touchée et ne dispose plus que d'un budget dépassant à peine les 200 millions d'euros, soit l'équivalent de celui de deux grandes écoles françaises comme Polytechnique, ou du tiers du coût de nos opérations militaires en Afghanistan. La réforme en cours est un fiasco, vue du terrain. Le budget des bourses données à des étrangers est aussi en chute libre, passant de 105 millions d'euros en 2006 à 61 millions d'euros en 2010. Notre réseau scolaire - plus de 460 établissements qui accueillent 250 000 élèves, dont la moitié sont des étrangers qui paient leur scolarité et seront des vecteurs essentiels de rayonnement pour notre pays - est menacé par les conséquences d'engagements présidentiels inconsidérés.
Les contributions volontaires aux programmes des Nations unies, qui témoignent de notre attachement au multilatéralisme et aux valeurs humanistes et de solidarité, ont diminué de moitié en trois ans : avec un total de 48 millions d'euros, la France devient un contributeur secondaire. Elle n'est plus qu'au 17e rang des contributeurs du Haut-Commissariat pour les réfugiés ou de l'Unicef, au 15e rang de l'Unwra (Aide aux 4 millions de réfugiés de Palestine), etc. Dans le même temps, 360 millions d'euros ont été promis par le président de la République pour le Fonds mondial sida. Où les prendra-t-on ? Où est la cohérence de notre action ?
On pourrait multiplier les exemples. Quel que soit le secteur d'activité - culturel, linguistique, coopération universitaire et scientifique, audiovisuel, missions et invitations de jeunes talents et d'experts -, la baisse des moyens depuis 2008 varie de moins 33 % à moins 50 %, voire conduit à la disparition de pans entiers de notre coopération.
Nos partenaires y voient au mieux la marque d'un décalage entre les paroles et les actes, au pire, celle d'un sérieux déclin, et les amis de la France s'en inquiètent partout dans le monde.
Enfin, en matière d'aide publique au développement, nous nous vantons d'être le troisième donneur d'aide derrière les Etats-Unis et le Royaume-Uni. En fait, l'aide publique au développement (APD) française repose pour 40 % de son montant sur des remises de dettes et sur la croissance très rapide des prêts bancaires accordés par l'Agence française de développement (AFD) aux pays émergents.
Les flux encore positifs aujourd'hui deviendront négatifs demain quand le remboursement de ces prêts devra être comptabilisé. En tendance, l'aide publique au développement française est plus proche des 0,3 % du revenu national brut (RNB) que des 0,5 % annoncés publiquement à l'OCDE, et très loin de l'engagement pris lors du sommet du Millénium de porter notre aide à 0,7 % du RNB en 2015.
La comparaison avec le Royaume-Uni est éclairante. Les deux pays affichent aujourd'hui des montants globaux comparables de l'ordre de 10 milliards d'euros, mais le décrochage de la France est patent au regard de l'argent "cash" que le Royaume-Uni investit dans des projets sur le terrain sous forme de dons, à travers des programmes bilatéraux ou multilatéraux, et qui est six fois supérieur au nôtre. Faute de peser financièrement, nous influençons de moins en moins les débats et les décisions dans les pays africains prioritaires pour nous, et ce sont les Anglo-Saxons qui s'imposent dans les enceintes où se concertent les bailleurs.
Des mesures d'urgence s'imposent : L'acte I doit être la négociation du budget 2012, pour donner un coup d'arrêt à la dégradation et fixer un nouveau cap pluriannuel. Au-delà, une réflexion plus globale s'impose. Des états généraux de l'influence de la France dans le monde pourraient permettre de mobiliser l'opinion publique et d'identifier les voies et moyens du redressement nécessaire. Notre pays dispose (encore) d'atouts dans la compétition mondiale. Il n'est que temps de réagir.
Groupe Marly, diplomates français
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/06/23/la-diplomatie-francaise-n-est-plus-qu-un-chateau-de-sable_1539855_3232.html
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