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infiltration

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Message  ivo Jeu 18 Mar - 9:21

infiltration

révélations sur l'infiltration des RG anglais dans les milieux radicaux londoniens

"Une affaire fait grand bruit en Grande-Bretagne en ce moment. Un
ex-policier s'est confié aux médias sur son rôle en tant qu'agent
infiltré dans le mouvement antifasciste radical an début des années
1990. Pas une infiltration brève, le temps d'une manif ou d'une
opération rapide, non, une infiltration étalée sur 4 ans. Quatre ans à
se battre contre les fafs et la police, à vivre 24h sur 24h, six jours
par semaines au milieu de gauchistes sous une fausse identité.

Comme
le but de l'opération n'était ni de démanteler le groupe, ni de
ramasser des preuves pour un éventuel procès, les agents de la Special Demonstration Division
pouvaient commettre tous les actes requis pour crédibiliser leur
couverture (y compris être violent, consommer ou entretenir des
relations «amoureuses»). À Londres seulement, une dizaine d'agents
infiltraient les deux côtés de la lutte antifasciste (c'est-à-dire que
les fafs aussi étaient infiltrés). Leur seul but était de permettre à la
police d'avoir une longueur d'avance pour «prévenir la violence».

*
* *

Il est réjouissant d'arriver à identifier des flics qui
«infiltrent» des manifs mais il ne faudrait pas que ça créé un faux
sentiment de sécurité. Personne n'est à l'abri de l'infiltration. «La
police doit demander un mandat avant de mettre votre ligne sous écoute,
ouvrir votre courrier ou vous placer en filature... par contre, la SDS
peut mettre quelqu'un dans votre voiture, dans votre bureau ou même dans
votre lit sans jamais demander de mandat ni que vous n'en n'ayez jamais
connaissance,» dit «l'Agent A».

La lecture des articles du Guardian et le visionnement de la
vidéo d'une dizaine de minute qui les accompagne (il s'agit d'un
entretien avec le flic doublé d'images d'archives) est hautement
recommandée.

source : endehors.org





Infiltration des RG dans le mouvement Autonome : On m’appelait l’étudiant par X
Catégorie société

A méditer. Sans commentaires. A méditer. Sans commentaires.

Pendant deux ans et demi, d’octobre 1977 à avril 1980, un inspecteur des Renseignements généraux de la préfecture de police de Paris a vécu parmi les autonomes, en totale immersion dans ce milieu qu’il était chargé d’espionner. Durant toute cette période, ce fonctionnaire a renseigné fidèlement ses chefs, leur révélant les projets de manifestations et leurs parcours, les attaques commandos et, bientôt, les braquages en préparation. La police a ainsi su ce qui se préparait à l’occasion de la fameuse manifestation du 23 mars 1979, à l’issue de laquelle des dizaines de vitrines volèrent en éclats et autant de magasins furent pillés.
Pourtant, on laissa faire...

L’infiltration est une vieille recette policière.

Après Mai 68, elle fut pratiquée à grande échelle. Avec des fortunes diverses. Dix ans plus tard, la pratique était quelque peu tombée en désuétude, lorsque émergea le phénomène autonome, qui lui redonna vie.

C’est cette expérience qu’a racontée à Georges Marion un jeune inspecteur.

J’ai souvent le chic pour me mettre dans des situations délicates, voire inextricables. Mon entrée dans la police et ce qui s’est passé ensuite en est une belle illustration. C’est au cours de mon service militaire, par hasard, que je suis tombé sur un avis de concours : on recrutait des inspecteurs pour la police nationale. Un copain m’a dit : "Pourquoi pas ?" Et on a réussi le concours.

C’était aussi simple que cela ; ce qui, d’ailleurs, me faisait rigoler. Mais cela m’inquiétait aussi. Politiquement, j’étais de gauche, et je n’avais jamais envisagé d’être flic. Cela me culpabilisait même d’être sur le point de le devenir. Alors j’en ai parlé à des amis du même bord que moi, lesquels m’ont encouragé dans cette voie. Leur argument, qui était également le mien, était simple : pourquoi laisser la police à la droite ?

Voilà, c’est comme cela que tout est parti. Avec, pour me permettre de passer le concours, quelques jours de perm supplémentaires. Que pouvait-on vouloir de plus ?

J’étais encore à l’armée quand, en décembre 1975, j’ai reçu les résultats du concours. J’avais brillamment réussi, en très bonne position. Si j’avais eu encore des scrupules, c’est là qu’ils auraient dû se manifester. Mais mon bon classement au concours a levé les dernières hésitations : je deviendrais policier.

Quelques mois plus tard, mon service militaire terminé, je suis entré à l’école des inspecteurs à Cannes-Ecluse (Seine-et-Mame), pour y accomplir ma période de formation. Ma scolarité fut moins brillante que ma réussite au concours d’entrée. Si bien qu’à la sortie de l’école je n’étais pas dans les premiers, loin de là. Conséquence immédiate : il ne restait plus beaucoup de possibilités lorsque est arrivé mon tour de choisir mon affectation. Les postes offerts aux nouveaux inspecteurs sont, en effet, attribués dans l’ordre de classement au concours de sortie. Non seulement il y a des services plus recherchés que d’autres mais aussi des endroits plus courus. Ainsi, Paris, où la vie est difficile, les loyers élevés et l’éloignement familial important, n’est pas très demandé.

Quand j’ai dû choisir mon poste, il ne restait plus que quelques places à la Pi ou aux RG parisiens. Courir après les voyous, ce n’est pas spécialement mon trip. J’ai donc pris les RG. Nous étions au début de l’été 1977.

Lorsqu’un nouveau arrive aux RG, il fait le tour de toutes les sections qui composent ce service, pour se familiariser avec ses différentes activités. On passe ainsi dans les sections qui s’occupent des milieux politiques, on jette un coup d’oeil à la "sociale", qui suit les syndicats, on fait un petit tour aux "jeux", qui observent casinos et cercles.

Ce n’est qu’après que l’on reçoit son affectation définitive.

C’est au cours de ce stage que j’ai pour la première fois entendu parler d’une section particulière, appelée "section de la direction". Comme son nom l’indique, cette structure était placée sous l’autorité immédiate du directeur des RG parisiens ou, à la rigueur, de son adjoint. C’est dire si elle était considérée comme importante. La section de la direction avait été créée tout de suite après Mai 68.

Elle était chargée de collecter le renseignement sur les milieux gauchistes. C’est le commissaire Philippe Massoni qui en avait eu l’idée. Quand je suis arrivé aux RG, Massoni avait déjà été promu au cabinet de Raymond Barre, où il était chargé des contacts avec les services secrets et aussi des "coups tordus". Le commissaire Ruvira l’avait remplacé à la tête de la section.

Une rumeur courait aux RG : la section de la direction, c’est mieux. En quoi consistait ce mieux ?

Personne ne le savait exactement et, malgré cette flatteuse rumeur, les candidats ne se bousculaient pas pour y entrer. J’ai, un jour, laissé entendre que ce boulot m’intéressait. Je l’avais dit sans insister, sans que cela prête à conséquence. Du moins je le pensais. Un matin, Ruvira me convoque et me demande si ça me plairait d’aller en lac pour continuer mes études. Aux frais de l’administration, naturellement ; en contrepartie, je devrais donner régulièrement des renseignements sur les milieux politiques gauchistes, particulièrement actifs en fac. J’ai accepté.

Quelque temps plus tard, l’adjoint de Ruvira m’a, à son tour, reçu pour voir si j’étais capable de faire le boulot. Il s’agissait d’une sorte de test, d’une discussion qui a porté sur la politique, mes lectures, etc. Des sujets bateaux. Cela a duré en tout et pour tout un quart d’heure. A l’issue de cette "épreuve", j’ai été déclaré "bon pour le service".

En juillet 1977, j’ai donc rejoint la section de la direction, en même temps que trois ou quatre autres nouveaux. A la rentrée universitaire suivante, je deviendrais "étudiant". C’est sous ce nom que l’on nous désignait aux RG.

En octobre 1977, quatre nouveaux "étudiants" (dont moi) ont été affectés en fac, et deux anciens l’ont quittée. A cette époque-là, à Paris, je ne crois pas qu’on n’ait jamais été plus d’une douzaine à infiltrer l’extrême gauche.

On m’avait laissé le choix de l’organisation à infiltrer.

Suivant les événements, vous verrez bien où aller, m’avait on dit.

En attendant la rentrée, la "Maison" m’a fourni une piaule de couverture et une carte orange. Mais, contrairement aux nombreuses légendes qui courent à ce sujet, on ne m’a pas fourni de faux papiers. Ça peut sembler fou mais c’est ainsi. On m’avait expliqué que si je m’inscrivais en fac sous un faux nom, je ne pourrais pas revendiquer les diplômes que je pourrais être amené à décrocher. Donc pas de faux papiers. Je ne sais pas ce que valait cet argument assez bureaucratique mais, de toute façon, il me semblait évident que je n’allais pas passer d’examens.

La carte orange que j’ai aussi reçue ne comportait que deux zones. Pas de frais exagérés ! Elle remplaçait la carte de libre circulation que tous les flics reçoivent et que je ne pouvais, évidemment, pas utiliser si je ne voulais pas me faire repérer. Quant à la piaule qu’on m’a fournie, c’était, là aussi, de l’improvisation. Cette chambre était située dans l’appartement d’une vieille assez sympa. Je n’ai jamais su comment elle est arrivée dans ce circuit mais, plusieurs mois plus tard, par hasard, j’ai appris qu’avant moi elle avait déjà eu comme locataire un flic infiltré. A croire qu’elle bénéficiait d’un contrat d’exclusivité avec la préfecture de police. Bref, question sécurité, on aurait pu faire mieux. Mais, dans la police, protéger les petits soldats en mission périlleuse n’est pas toujours le souci essentiel.

En septembre 1977, à la rentrée universitaire, je me suis inscrit à la fac de Tolbiac. Et j’ai attendu une occasion propice. Elle n’a pas tardé. Quelques jours après mon arrivée en fac, j’ai assisté à ma première réunion, celle du comité Malville.

C’est mon divisionnaire qui m’y avait envoyé. Le divisionnaire, c’était mon contact ou, si l’on préfère, mon "officier traitant". C’était un flic des RG, comme moi, un inspecteur divisionnaire chargé de m’aider si j’avais des problèmes dans ma mission. C’est aussi à lui que je communiquais les informations que je recueillais. Plus tard, quand j’ai commencé à craquer, il m’a été d’un grand secours.

Donc mon divisionnaire m’envoie à la réunion du comité Malville. Le comité vivait sur la lancée de la grande manifestation antinucléaire de l’été 1977 à Malville. Des milliers de manifestants s’étaient durement affrontés aux flics pour protester contre la construction d’un surgénérateur. Il y avait eu des gars arrêtés, un procès mémorable et un grand émoi dans l’opinion publique. Le comité Malville de Paris s’était réuni pour envisager la suite de la mobilisation. Mais, déjà, le mouvement commençait à s’essouffler et le comité battait de l’aile. La réunion a été plutôt tendue.

D’un côté, il y avait les écolos traditionnels, qui parlaient de continuer l’action sur les bases antinucléaires qui étaient les leurs. Et, en face, il y avait les "violents" : ceux pour qui le combat écologiste était une occasion parmi d’autres pour casser du flic. Au cours de la réunion, il y a eu clivage entre les deux tendances. Les "violents" ont appelé à une autre réunion, une semaine plus tard. C’est évidemment là que je suis allé. Pour mon boulot d’infiltration, c’est les gars qui apparaissaient comme les plus déterminés qu’il était intéressant de suivre.

Cette deuxième réunion s’est tenue dans un immeuble du 20e arrondissement. Tout un groupe de gars et de filles y vivaient en bande, squattérisant les logements vides promis à la démolition.. Après cette réunion, il y en a eu d’autres. Et d’autres encore. C’est comme cela que j’ai réussi à m’intégrer aux autonomes. Une infiltration classique, facilitée par le fait que mes "clients" ne prenaient quasiment aucune mesure de sécurité.

Ils étaient sympas, mes autonomes. Chaleureux, souvent intelligents, parfois complètement dingues, ils ne laissaient jamais indifférent. Aussi n’était-il pas si simple d’être à la fois flic et autonome. Je sais que tous les flics qui, comme moi, ont été introduits chez eux ont eu des difficultés à maîtriser une sorte de sympathie incontrôlée.

Les collègues qui venaient de milieux quasi fascisants ont connu le même phénomène. Psychologiquement, donc, c’était délicat. D’un autre côté, je suppose que nous n’aurions pas pu faire le boulot si nous avions été totalement indifférents. Il faut être attiré par les gens chez qui on s’infiltre, sinon... C’est évidemment cette contradiction qui pose des problèmes ensuite.

En ce qui me concerne, au début, je n’ai pas arrêté de me marrer. Je me souviens ainsi d’une journée de solidarité avec les prisonniers politiques en Allemagne. On avait décidé de faire deux attentats à l’explosif contre les locaux du Ps. Ces cibles symboliques avaient été choisies pour souligner la responsabilité du gouvernement social-démocrate allemand dans la mort des membres de la "bande à Baader". Bon, la bombinette a pété, rien de bien grave, et l’attentat a été revendiqué par le "Groupe martyr Maurice Thorez et Jacques Duclos". C’était le nom qu’on s’était choisi, pour rigoler. Par dérision. Malheureusement, cette fois-là, Libé n’a pas publié notre communiqué.

Autre raison pour laquelle ce travail d’infiltré me convenait bien : j’étais maître de mon temps.

Au début, certes, je téléphonais deux fois par jour à mon divisionnaire ; mais plus tard j’ai levé le pied. Je continuais à informer, bien sûr, mais j’avais pris le rythme, je savais expédier mon boulot en quelques jours et, le reste du temps, je voyais des gens, je discutais dans des cafés ou je préparais des "coups". J’aimais ce que je faisais. C’était un jeu fantastique. Avec plaisir, j’étais tout simplement devenu un agent provocateur.

Entendons nous sur le terme : je n’étais pas à l’origine des actions violentes faites par les autonomes. Mais, parce que c’était le plus intéressant pour moi et pour mes chefs, je suivais les plus déterminés, calquant mes positions politiques sur les leurs. Ils étaient favorables à une action dure ? Je l’étais aussi.

J’ai ainsi suivi toutes les manifs qui, entre octobre 1977 et la fin de 1979, ont vu les autonomes opérer. Je venais à peine de m’infiltrer chez eux quand j’ai participé à la manifestation de Kalkar en RFA.

C’était une manif antinucléaire appelée par les écolos allemands.

De nombreux Français y sont allés, dans des dispositions diverses.

Pour les autonomes, le problème était toujours le même : manif offensive (c’est-à-dire violente) ou non ? Des discussions de ce type, j’en ai entendu des dizaines. Cette fois-là, comme souvent, on y est allés avec des casques. Pour faire comme les autres, j’avais acheté le mien que je me suis d’ailleurs fait confisquer à la frontière, quand notre car a été contrôlé par la police belge. A Kalkar, j’ai vu la police allemande évoluer avec des hélicoptères, des moyens de guerre fantastiques, jamais vus en France dans des manifestations de cette sorte. J’ai bien rigolé et je me suis fait des copains.

Après Kalkar, j’ai participé à toutes les manifs des autonomes. II y a eu la manif Baader au cours de laquelle on a cassé la vitrine de France-Soir, les manifs pour Croissant, d’autres encore. A chaque occasion, on cassait. J’ai jamais vu descendre autant de vitrines que durant ces mois.

J’ai aussi participé au mouvement des squatters : on forçait des logements vides dans les quartiers en rénovation et on s’y installait. Parfois, on nous en délogeait mais on revenait quelque temps plus tard. Un soir, dans l’un de ces appartements, on a reçu en grande pompe un journaliste. Il faisait une enquête sur les autonomes et tournait dans le milieu depuis quelque temps. On l’a invité à bouffer pour une discussion à bâtons rompus. Au menu, du saumon et du champagne fauchés la veille dans un supermarché. Spécialement pour l’occasion. Je me souviens de sa tête : il était un peu éberlué de l’ambiance, de ces victuailles. S’il avait su que, parmi ses interlocuteurs, il y avait un flic...

Et puis, alors que le mouvement commençait à s’essouffler, les braquages ont commencé. Ce n’est pas venu comme cela, du jour au lendemain.

Il fallait sans doute une certaine situation politique pour que quelques-uns en viennent à théoriser le hold-up comme une action de refus révolutionnaire. Il est vrai qu’il existait des références : les Italiens en avaient fait, de même que Baader et son groupe. Le culte du P38 et aussi, plus prosaïquement, le fait que beaucoup de ces gars n’avaient pas de revenus fixes devaient déboucher un jour ou l’autre sur ce genre d’actions.

Avant d’en arriver là, on était d’ailleurs passés par de petits délits : des vols à la tire, partir d’un restaurant sans payer ou alors payer avec un chéquier volé. Je me souviens qu’on a, un jour, décidé de voler un sac à main. C’était ma première fois. Un soir, place Maubert, on est tombé sur deux femmes et on leur a fauché leurs sacs. Je n’étais vraiment pas fier, mais c’est comme cela qu’on se procurait les chéquiers et les pièces d’identité qui permettaient de faire passer les chèques.

Quand le groupe où j’étais a commencé à parler de braquage, j’ai compris que je franchissais un pas de plus, que ça devenait délicat. Mais, curieusement, j’étais victime d’un dédoublement de ma personnalité. Autonome, j’étais assez excité par ce projet et, policier, je voulais faire l’affaire, c’est-à -dire arrêter les braqueurs. Encore fallait-il qu’ils passent à l’action.

Des projets de braquage, il y en a eu beaucoup. A un moment, autour de moi, on ne parlait que de ça. On élaborait des plans, beaucoup de plans. Heureusement, peu se sont réalisés. Des autonomes ont été tués dans ces affaires, abattus à la sortie de la banque par la police. J’en connaissais certains, des types bien.

Le groupe où j’étais a eu ses projets, lui aussi. L’un d’entre eux a même été assez poussé. J’avais, bien entendu, prévenu mes chefs de ce qui se préparait. Ils étaient plutôt embarrassés. Laisser accomplir un hold-up dont on connaît les auteurs peut, en effet, procurer un moyen de chantage qui permet, ensuite, de manipuler des gars "tenus". Il y a eu plusieurs cas comme cela. Mais ça peut déboucher sur une fusillade incontrôlée dont on ne tire aucun bénéfice. Sans compter le risque qu’un jour on apprenne que la police était au courant du hold-up en préparation et n’est pas intervenue...
Et puis, il y a le dilemme classique en matière d’infiltration ou bien on procède à des arrestations, si possible en flagrant délit, et l’on risque de démasquer l’informateur alors qu’il faut plusieurs mois pour que son successeur devienne opérationnel ; ou bien on laisse faire, mais l’informateur est obligé, pour ne pas se démasquer, de participer au hold-up, ce qui n’est pas sans risque.

Bref, mes chefs ne savaient pas trop quelle attitude prendre.

Ils m’ont donné une consigne à la mesure de leur embarras : "Essayez de vous mouiller le moins possible dans ce coup là." Et comme ils se rendaient compte que c’était plus facile à dire qu’à faire, ils ont envisagé, à un moment, de laisser faire le hold-up. Avec ma participation. Ils avaient même prévu, pour me protéger, de mettre aux alentours de la banque qui devait être attaquée un dispositif de protection. Lequel devait empêcher l’intervention éventuelle d’un autre service qui aurait pu être alerté par les témoins.

C’était vraiment pas triste, cette idée : des flics des RG protégeant, l’arme au poing, une équipe de braqueurs dans laquelle opère un collègue ! Heureusement, ce projet de hold-up ne s’est jamais réalisé. Au dernier moment, nous n’avons pas trouvé la bagnole adéquate. Sans cela, je montais au braquage...

En tant qu’autonome, j’ai évidemment participé à toutes les manifestations qui ont défrayé la chronique de ces dernières années, notamment à celle du 23 mars 1979.

La rentrée universitaire de 1978, sur laquelle les autonomes comptaient beaucoup, a été décevante. En fait, elle a même été plutôt plate, rien ne venant rompre le ronron quotidien. C’est en tout cas comme cela que notre groupe l’avait perçue. Dans une telle situation, il y a toujours des gens pour proposer une action choc, susceptible de "réveiller les masses".

C’est dans cet état d’esprit qu’a été conçue la manif de Saint-Lazare : une sorte de raid dans le quartier des grands magasins, paradis de la marchandise alors que le chômage fait des ravages. Des dizaines de vitrines ont été cassées, il y a eu des arrestations mais, politiquement, l’action n’a pas été un succès. Très minoritaire chez les autonomes eux-mêmes, elle est restée largement incomprise. Je n’ai pas participé à cette manifestation, j’étais en vacances quand elle a eu lieu.

Les autonomes n’avaient vraiment pas la frite quand sont survenus les premiers incidents de Longwy. La restructuration de la sidérurgie lorraine mettait sur le pavé des milliers d’ouvriers, ce qui, naturellement, entraînait des manifs et, parfois, des affrontements. Les ouvriers se battaient le dos au mur et les manifs sont vite devenues très violentes.
Les autonomes y ont vu un signe politique : que la classe ouvrière lorraine renouait avec des traditions de lutte dure et que la violence faisait l’objet d’un large consensus.

C’était d’ailleurs exact, du moins parmi les sidérurgistes. Bref, les autonomes pensaient qu’ils pouvaient intervenir sur leurs objectifs propres, qu’ils étaient en mesure de radicaliser le mouvement. C’est ainsi que plusieurs d’entre eux se sont déplacés en Lorraine, où ils ont commencé un travail de contact, se sont battus dans les manifs, sont intervenus dans les assemblées syndicales, notamment à la CFDT, où ils avaient une certaine influence.

Quand la CGT a annoncé son intention d’organiser, le 23 mars 1979, une "montée" des sidérurgistes lorrains sur Paris, n’importe quel autonome de base savait qu’il y participerait et que ce serait violent. Et d’ailleurs, ils ont tout fait pour que ça le soit.

Chez les autonomes, la préparation de la manif a été fébrile. Tout le monde a préparé son casque et s’est apprêté à monter à l’assaut des flics et des vitrines. Des cocktails Molotov avaient été préparés. S’ils ont peu servi, c’est à cause d’un incident imprévu. Trois cents cocktails avaient été cachés dans une voiture en stationnement sur le parcours du cortège. Mais celui qui avait la clé de la voiture a été interpellé avec une centaine de ses camarades, le matin même de la manif, au cours d’une opération préventive déclenchée par la police. On n’a donc pas pu se servir des cocks.

Ces interpellations ont également empêché une autre intervention mise au point par les autonomes pour cette manif. Des groupes de quatre ou cinq militants avaient été constitués. Ils devaient progresser au même rythme que le cortège, mais dans des rues parallèles à lui, et profiter de l’absence des forces de l’ordre, concentrées ailleurs, pour braquer toutes les boutiques qui se trouveraient sur le parcours. Le projet était complètement fou - mais, chez les autonomes, on ne faisait pas toujours dans la retenue. Dans les semaines précédant la manif, mes chefs me sollicitaient sans arrêt. Ils voulaient tout savoir, demandaient le maximum de renseignements, exigeaient qu’on rapporte le moindre détail. Sur cette manif, c’est sûr, ils ont vraiment été informés. Et pourtant, sur le terrain, les forces de l’ordre sont apparues complètement dépassées, laissant opérer les casseurs en toute quiétude.
A-t-on organisé la pagaille en introduisant des groupes de provocateurs dans le défilé ? Je ne sais.

Personnellement, je n’étais pas sur le terrain car, comme mes "camarades", j’avais été interpellé le matin et j’ai passé la journée au dépôt. En revanche, je sais que si certains, au gouvernement ou dans la police, ont voulu que ça dégénère, il n’était pas besoin de faire appel à des spécialistes. Le cortège comptait suffisamment d’autonomes qui s’étaient préparés à la casse - et cela, la police le savait.
Sans compter les quelques sidérurgistes qui, eux aussi, pris par l’ambiance, ont mis la main à la pâte. Bref, si l’on voulait que ça pète, il suffisait de laisser faire.

Cela n’exclut évidemment pas une intervention extérieure ; mais, là-dessus, je n’ai pas d’informations précises.

Les photos parues dans la presse le lendemain m’ont quand même frappé. On y voyait un grand chauve courant de vitrine en vitrine. Certains ont cru reconnaître un agent du SDECE. Ce qui est sûr, c’est que ce type était inconnu des milieux autonomes et qu’il a agi sans que la police tente de l’intercepter. Plusieurs journalistes ont d’ailleurs noté cette bizarrerie.

Le lendemain de la manif, on s’est réunis à l’Ecole normale, rue d’Ulm. On était euphoriques. Tu penses, ça avait pété de partout, pas mal de sidérurgistes s’étaient joints à nous ; bref, le bilan était excellent et les perspectives s’annonçaient bonnes. En fait, la vague est vite retombée. Le ler Mai suivant, les autonomes ne se sont même pas déplacés pour participer au cortège des syndicats, comme les années précédentes. La seule chose qu’on ait faite, ce fut une petite "nuit bleue", durant laquelle quelques vitrines ont pété.

Comme je l’ai déjà dit, ce n’était pas facile d’être flic et autonome. Au bout d’un an, j’ai commencé à ressentir les premiers "malaises".
Ça devait arriver : tu vis sans arrêt avec des mecs sympas d’un côté et, de l’autre, tu les balances. Résultat. t’es complètement écartelé, avec personne à qui en parler.

Bref, c’était pas commode. C’est à la fin de 1978, lors d’une manif pour le Larzac, que j’ai commencé à craquer.

C’est venu brusquement, sans que je sache pourquoi. La manif se terminait dans le 13e, près de la porte d’Italie. Il y a eu des incidents, comme d’habitude. Et là, soudain, j’ai commencé à flipper. C’était ma première crise. Après, j’en ai connu d’autres, de plus en plus rapprochées. Chaque fois que j’étais bien avec les autonomes, j’avais envie de leur dire que j’étais flic. Je devenais complètement fou.

Les collègues qui, comme moi, étaient infiltrés vivaient le même genre de truc. On a décidé de se réunir régulièrement, pour parler entre nous de tout ça. C’était évidemment imprudent du point de vue de la sécurité, mais personne ne nous en a fait le reproche. Nos chefs devaient plus ou moins sentir qu’on avait des problèmes. C’est sans doute pour cette raison que notre directeur, le patron des RG parisiens, nous a, un jour, invités à déjeuner. Il voulait nous parler, sans doute savoir jusqu’où on commençait à dérailler, nous montrer aussi qu’on n’était pas seuls, qu’on avait le service derrière nous. C’est tout à fait inhabituel qu’un directeur déjeune avec de simples inspecteurs.

Un jour, c’était en avril 1980, j’ai décidé de tout laisser tomber. Du jour au lendemain, j’ai voulu arrêter. J’ai senti que j’allais commencer à en savoir trop, que je devais cesser si je voulais m’en sortir.

Voici comment ça s’est passé.

L’une des discussions permanentes du mouvement autonome portait sur la question de l’organisation. Il y avait les partisans de l’inorganisation totale, ceux qui inclinaient pour une structure quasi militaire et, entre les deux, une large palette de positions différentes. On discutait constamment de ça. C’est ainsi qu’une cinquantaine de mecs ont décidé de construire une organisation compartimentée, composée de petits groupes de cinq militants. Et, bien sûr, je me suis retrouvé là-dedans.

On s’essayait à la clandestinité en fantasmant autour de la technique. On a donc commencé à travailler sur les récepteurs radio. L’idée, c’était de fabriquer un maximum de récepteurs pour écouter les flics et observer leurs manoeuvres sur le terrain. Lors d’une manif à propos de Plogoff, on a ainsi compris à quel point le mécanisme de mise en route des flics était lourd, combien leur charge était craintive dès qu’il y avait une résistance un peu soutenue, par exemple avec des cocks bien ajustés. Les autonomes étaient surpris et ravis de leur découverte. Ils avaient compris qu’avec de faibles moyens militaires, un peu d’astuce et de surprise, ils pouvaient faire très mal contre la police.

L’un de ces groupes a été plus loin dans la recherche technique et s’est essayé aux détonateurs à distance. Ce n’était plus exactement du bricolage innocent.

Pour moi, cette période a été particulièrement dure.

Je vivais vingt-quatre heures sur vingt-quatre au sein de mon groupe, entouré de mecs sympas. Il y avait notamment un braqueur avec lequel je me suis bien lié. Un type super. A force de vivre ensemble, forcément, on commençait à se connaître, à se raconter des histoires. Ainsi, il y avait dans le groupe des gars qui avaient milité avec ceux qui, quelque temps plus tard, formeraient Action directe. Ils n’arrêtaient pas de me faire des confidences sur eux, sur l’action armée, sur l’Italie et les groupes autonomes de là-bas. En écoutant tous ces bavardages, je ne savais plus très bien qui j’étais :
autonome, flic, ou rien.

Un jour, j’ai craqué. J’étais moralement fatigué, complètement déphasé. Je suis allé voir mon divisionnaire, qui a compris que je déraillais et m’a donné quinze jours de congé. En sortant de son bureau, je suis entré à la librairie de la FNAC. Je rêvais de partir en voyage. Je me suis retrouvé au rayon tourisme, feuilletant les guides. Il y en avait un sur Venise. Ça n’a pas raté : je l’ai volé et, naturellement, je me suis fait pincer à la sortie par les gardiens. Et là, le cirque a commencé.

L’un des vigiles m’a d’abord emmené dans une pièce retirée. Dedans, il y avait déjà un "client" qu’on était en train de bousculer. Aussi sec, je leur lance : "Arrêtez, vous n’êtes pas dans un commissariat !" Les types se retournent vers moi, pas aimables, avec un air du genre : il est inconscient, le mec. L’un d’eux me lance : "Venez ici !" Moi, je me marrais. Tranquillement, je sors une cigarette. Aussitôt, l’un des types lâche : "Ici, on ne fume pas." Je me marrais de plus en plus. J’ai bien sûr refusé de leur donner mes papiers. Alors, en désespoir de cause, ils ontdû appeler les flics etje me suis retrouvé au commissariat. C’est là que j’ai lâché lemorceau "Mon nom est X, je suis inspecteur de police, vous me faites chier et j’ai envie de démissionner."

La tête du collègue quand il a vu mes papiers ! Il n’a pu que répondre : "Ne fais pas le con. Ce n’est pas le moment de démissionner. Avec ton ancienneté, tu vas bientôt atteindre le troisième échelon."

Après cet intermède burlesque, je me suis retrouvé à l’IGS. Les flics du commissariat avaient préféré m’y envoyer plutôt que de prendre la responsabilité de me relâcher. C’est là que mon chef de service est venu me récupérer. Ensuite, le directeur des RG a arrangé le coup et on a tout effacé. Moi, on m’a envoyé en vacances. J’en avais bien besoin. Nous étions fin avril 1980. Cette année là, j’ai pris six mois de vacances, à l’issue desquelles j’ai été muté dans un autre service.

Je n’ai jamais plus revu mes anciens copains autonomes.


merci flippy pour les sources.
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Message  ivo Ven 4 Fév - 10:46

voir aussi:

infiltrations et autres ruses de chacals

http://www.pavillon-noir.info/t1535-infiltrations-et-autres-ruses-de-chacals#12570
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Message  ivo Jeu 29 Sep - 20:19

quand l'infiltration devient de la propagande antiterroriste, au point de les créer ???
https://pavillonnoir.forumactif.org/t1587p30-guerres-de-religions#23138
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Message  ivo Mer 14 Mar - 18:49

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Message  spike Jeu 22 Mar - 12:53



Voici un article, très long certes, mais fort intéressant sur un flic infiltré dans divers milieux d'extrême gauche. De sommets anti G8, en passant par l'activisme écologique, Tarnac, CPE and co, les dégats d'un soi-disant gauchiste international.

article des inrocks : http://www.lesinrocks.com/actualite/actu-article/t/79696/date/2012-03-13/article/mark-kennedy-la-taupe-de-tarnac/?tx_ttnews[sViewPointer]=1&cHash=80fb2cc03cfa6ec80b95d9908d09cd1f

Son grand corps blond tatoué aux bras, sa queue de cheval et ses petits yeux qui louchent ont fait la une des journaux anglais en janvier 2011. Mark Stone, militant gauchiste international. Mais l'habit ne fait pas le rebelle : sous la fausse identité de Stone se cache le policier Mark Kennedy.

De 2003 à 2010, Stone/Kennedy a infiltré la gauche radicale anglaise et européenne. Il a vécu undercover chez les activistes écologistes, altermondialistes, anarchistes et antifascistes, partageant leurs repas, leurs fêtes, leurs manifs. Parfois leurs lits. Ils ont fini par découvrir sa trahison mais trop tard. Tout ce qu'ils faisaient et disaient depuis sept ans était déjà entre les mains de la police.

Stone a aussi œuvré en France. Il semble même avoir joué un rôle important dans l'affaire de Tarnac. Dans plusieurs pays européens, son rôle d'agent provocateur a suscité des scandales. En France, ses activités restent méconnues.

L'infiltration commence en 2002. Mark Kennedy, policier à Londres depuis huit ans, rejoint la National Public Order Intelligence Unit, une agence britannique qui surveille les "extrémistes domestiques" (anarchistes, défenseurs de la cause animale...).

Sa mission débute en août 2003 : il doit s'immerger dans le milieu des écologistes radicaux et gagner leur confiance. Il enfile un bermuda, attache ses longs cheveux et se rend seul sur le campement du groupe écolo Earth First. Il s'y fait des amis et leur offre ses bras pour soutenir leur cause. Il donne même de l'argent. Il dit gagner sa vie à l'étranger comme alpiniste professionnel.

En 2009, des activistes commencent à se méfier

Avec les écolos britanniques, il débat, manifeste, danse et boit. Personne ne doute de ce militant si zélé, toujours prêt à accrocher une banderole sur une centrale électrique ou à conduire ses camarades sur les lieux d'une action dans son pick-up bleu. Pendant sept ans, il voyage. Dans onze pays, il infiltre et espionne, nous apprend un rapport de la police anglaise : réunions internationales, "camps climat", villages alternatifs, contre-sommets.

Mais en 2009, malgré six ans de parfaite intégration, des activistes commencent à se méfier de lui. En avril, quand vingt-sept écolos sont arrêtés pour avoir planifié l'invasion d'une centrale à charbon, Mark est le seul à ne pas être poursuivi. En octobre 2010, sa petite amie, une militante, trouve dans son sac un passeport au nom de Mark Kennedy. Elle se confie à ses camarades.

Ensemble, ils enquêtent et trouvent des documents confirmant sa fausse identité. Ils comprennent que leur camarade est policier. Un matin, six personnes l'interrogent pendant plusieurs heures dans une maison de Nottingham, jusqu'à ce qu'il avoue. Ils le laissent partir et alertent le Guardian, qui révèle l'espionnage de l'extrême gauche par la police anglaise.

Un pied dans l'affaire de Tarnac

Quels dégâts a commis l'infiltré ? Durant toute la période où il a agi, les polices européennes se sont coordonnées. Elles ont échangé un maximum d'informations sur les déplacements internationaux des activistes, installé des dispositifs de sécurité inviolables lors des contre-sommets, surveillé au plus près les mouvements jugés potentiellement déstabilisateurs ou terroristes. Pièce clandestine de ce dispositif, Kennedy a surveillé des militants allemands, islandais, italiens, espagnols et français.

C'est ainsi qu'il met un pied dans l'affaire de Tarnac. Rappelons les événements de novembre 2008 : la police antiterroriste française lance un raid sur la ferme de Tarnac, en Corrèze, arrête là-bas et dans d'autres villes vingt personnes qu'elle soupçonne d'avoir comploté pour ébranler l'Etat en sabotant des voies SNCF. Dix sont mises en examen pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste.

En avril 2008, quand le parquet ouvre une enquête préliminaire sur ce groupe de Tarnac, il a très peu d'éléments. Il dispose du travail des Renseignements généraux (RG) sur certains de ces militants. Dans ces dossiers, plusieurs informations viennent de Mark Kennedy, qui travaillait aussi pour des policiers français. L'agent a croisé au moins trois fois les jeunes gens de Tarnac. A chaque fois, ses observations ont laissé une trace dans le dossier judiciaire établi contre les comploteurs présumés. "Il est à notre sens fort probable qu'il ait joué un rôle très important", affirme Joseph Breham, l'un des avocats des mis en examen.

Le premier contact entre Stone et les habitants de Tarnac a lieu en février 2007 à Varsovie, en Pologne. Un vendredi, cent à deux cents militants venus de toute l'Europe se retrouvent dans une salle publique pour décider des actions à mener contre le G8 d'Heiligendhamn, prévu en juin.

Un autonome français de 30 ans participait à ce rassemblement. Il nous décrit les lieux : "Ça ressemblait à un centre social. Nous étions dans une salle où se tenaient parfois des concerts." Rien de secret : tous les débats sont annoncés sur des affiches et sur le site alternatif Indymedia. "C'était plutôt ouvert, ajoute notre témoin. Pas un truc black bloc clandestin." Dans la foule des altermondialistes, des activistes du réseau Dissent! et des partisans de Die Linke (l'équivalent du Parti de gauche en Allemagne), cinq personnes du "groupe de Tarnac".

Sur la manière de contre-manifester au sommet du G8, les stratégies divergent. "Depuis Seattle et Gênes, c'est la discussion systématique : faut-il s'approcher de la zone rouge, bloquer les voies d'accès au sommet, faire autre chose ?" Rodées aux contre-sommets, les polices européennes renforcent chaque année leur dispositif de sécurité. Il devient de plus en plus difficile pour les militants de s'approcher des lieux. C'est là que les cinq Français de Tarnac proposent un plan B : faire irruption par surprise à Hambourg ou Berlin, loin du sommet, là où les forces de police ne se seront pas déployées préventivement. Dans la salle, Mark Stone les écoute. Il est venu avec des militants écolos anglais.

"Notre seul lien avec la Pologne est cette réunion-là"

Un an après, en juin 2008, la direction des RG remet au ministre de l'Intérieur un rapport confidentiel-défense (publié en mars 2012 par Mediapart) intitulé : "De la contestation anti-CPE à la constitution d'un réseau préterroriste international : regard sur l'ultragauche française et européenne". Dans ce rapport, trois personnes du groupe de Tarnac sont citées noir sur blanc comme ayant participé à la réunion de Varsovie. Le document les désigne comme "premier cercle" d'un "groupe informel d'ultragauche de type autonome" préparant des actions violentes en Europe.

A la même période, la police française demande l'ouverture d'une enquête préliminaire sur le groupe de Tarnac. Dans leur demande au procureur, les policiers s'inquiètent des "rendez-vous internationaux de la mouvance anarcho-autonome" et citent comme premier exemple celui de la Pologne.

Pour les mis en examen de Tarnac, c'est une certitude : Mark Stone a révélé leur présence à Varsovie à la police française. L'un d'eux nous explique : "Le début de l'enquête policière se fonde sur nos prétendues relations à l'étranger. Notre seul lien avec la Pologne est cette réunion-là, à laquelle Stone a assisté. D'autres informateurs auraient pu signaler notre présence en Pologne, mais cela s'est répété ensuite : à chaque fois que Stone nous a croisés quelque part, des éléments sur nous ont atterri dans les dossiers de la police." Il se souvient du policier infiltré : "Tu voyais sa gueule, tu t'en rappelais. Il avait un œil qui regardait par là, il était un peu plus vieux que la plupart des participants et parlait anglais au milieu d'Allemands et de Polonais."

"Du moment qu'il décide de vivre avec nous, c'est indétectable !"

Joël*, militant français du réseau Dissent!, actif dans l'organisation des contre-sommets, assistait à la réunion de Varsovie. Il y avait remarqué Stone parce qu'il l'avait déjà croisé pendant la préparation du contre-sommet de Gleneagles, en 2005.

"Pour moi, Mark faisait partie des gens qui avaient créé Dissent! en Angleterre. Je l'ai rencontré à Londres dans un squat qu'il avait ouvert avec des amis. Je ne lui ai pas vraiment parlé. Ce n'était pas quelqu'un qu'on abordait facilement : il était très british, un peu en retrait."

Lorsque le policier est démasqué quatre ans plus tard en 2010, Joël n'en revient pas. "Pour éviter l'infiltration, on dit qu'il faut bien connaître les gens. Mais du moment qu'il décide de vivre comme nous, d'être parmi nous pendant des années, c'est indétectable ! Personne n'avait aucun doute à son sujet."

Indétectable, indétecté, Mark Stone fait son nid dans des petits cercles de militants pourtant prudents. Un an après Varsovie, en janvier 2008, on le retrouve à New York. Accompagné d'un ami anarchiste américain qui vit en Angleterre, il est dans le bureau d'une activiste new-yorkaise, à Manhattan. Se joignent à eux un autre Américain, un Japonais vivant aux Etats-Unis et deux Français : Julien Coupat et sa compagne Yldune Lévy, en vacances à New York. Ils ne connaissent que l'ami américain de Mark. Celui-ci les invite à rencontrer ses copains.

"Ce sont des potes de potes de pays différents, avec à l'évidence des centres d'intérêt communs, qui se retrouvent au même endroit et discutent quelques heures, explique un proche de Julien Coupat. Tout le monde fait ça." Quel souvenir les participants de cette réunion gardent-ils de Mark Stone ? "Il avait toujours l'air normal, avec ses tatouages et ses piercings, comme un poisson dans l'eau", raconte l'un d'eux.

D'après ce témoin, le policier infiltré avait expliqué qu'il était venu à New York "voir son frère". Durant la réunion, Julien Coupat prend quelques notes dans son carnet. Ce jour-là, il griffonne ce prénom : "Mark".

Quelques jours après, Julien Coupat et Yldune Lévy rentrent en France. Pour cela, ils franchissent la frontière Etats-Unis/Canada illégalement, en pleine nature, loin des douaniers. Pourquoi ? Pour entrer aux Etats-Unis, ils devaient posséder un passeport biométrique et donc donner leurs empreintes digitales. Comme ils s'y refusent, ils sont passés par le Canada, qui n'exige pas d'empreintes, en franchissant la frontière par les bois.

A l'aller, pas de problème. Au retour, des camarades américains les conduisent en voiture au plus près de la frontière puis les laissent la franchir à pied pour les récupérer côté canadien. Mais avant qu'ils ne se rejoignent, la police canadienne contrôle la voiture. Elle découvre le sac à dos de Julien Coupat, son permis de conduire, son carnet et des photos de Times Square. Comprenant que le Français a dû franchir la frontière illégalement, la police canadienne saisit ses affaires, qui lui seront par la suite restituées.

Qui pouvait révéler aux RG la présence des Français à Manhattan ?

Quatre mois plus tard, en France, la Sous-division antiterroriste (Sdat) demande au procureur d'ouvrir une enquête préliminaire sur le groupe de Tarnac, dont aucun membre n'a encore été arrêté. La police antiterroriste motive sa demande en dressant le portrait d'une "structure clandestine anarcho-autonome entretenant des relations conspiratives avec des militants de la même idéologie implantés à l'étranger".

Pour le prouver, les policiers citent le voyage américain de Julien Coupat et Yldune Lévy, leur passage clandestin de la frontière et leur participation à une "réunion d'anarchistes américains à New York". Ils évoquent également un engin incendiaire lancé contre un centre de recrutement de l'armée américaine à Times Square, pour lequel l'enquête n'a trouvé aucun coupable. La police américaine a pourtant écarté une participation des Français à cette attaque puisqu'ils avaient déjà quitté les Etats-Unis.

Dans leur lettre au procureur, les policiers de la Sdat affirment que ces informations leur ont été fournies par les RG. Qui pouvait révéler aux RG la présence des deux Français à la petite réunion anarchiste de Manhattan ? Les mis en examen confirment que leurs soupçons se portent sur Mark. L'un deux précise : "Les Américains présents ce jour-là ont par la suite été inquiétés par la police : ça ne peut donc pas être eux qui ont informé les policiers français. Reste le Japonais et Stone. Vu ce qu'on sait de lui maintenant, j'en déduis que l'information vient de Stone."

Au bon endroit, au bon moment. Pendant l'été 2008, trois mois avant leur arrestation, les habitants de Tarnac voient débarquer dans leur ferme deux visiteurs. Mark Stone et son copain américain, celui qui l'accompagnait à New York. Une visite amicale, tourisme militant. "L'été, à Tarnac, il y a toujours plein de gens qui passent", raconte un résident de la ferme du Goutailloux, transformée en lieu de rendez-vous et d'habitation collective.

"Les visiteurs vont et viennent, deux jours ou deux semaines. Ils dorment sous la tente ou chez des gens. S'il y a des travaux à faire, les volontaires participent, les autres se baignent, lisent, cuisinent, se promènent, regardent des films. Stone est passé par là comme des centaines de personnes depuis des années. Je n'ai aucun souvenir de lui sinon qu'il était là. Ce n'était pas un pote et il ne nous collait pas aux basques."

"Une fois de plus, Stone est parmi nous et un renseignement parvient à la police"

Fin juillet. Mark Stone campe à Tarnac. A Paris, un policier antiterroriste rédige ce procès-verbal :

"Ce jour, sommes avisés par une source désirant garder l'anonymat qu'un membre important de la mouvance anarcho-autonome d'origine italienne et agissant au niveau européen est susceptible de se rendre, le 30 juillet 2008 en milieu d'après-midi, à la gare de Limoges (Haute-Vienne), en provenance de Paris, afin d'y être pris en charge dans le but de rencontrer le nommé Julien Coupat."

Cet Italien, que la police considère comme un "membre important de la mouvance", se nomme Marcello Tari, c'est un chercheur indépendant, auteur d'un livre sur le mouvement autonome italien des années 70 édité en France.

Notre témoin de Tarnac ne croit pas à une coïncidence : "Une fois de plus, alors que Stone est parmi nous, un renseignement parvient à la police. Les autres militants qui passaient à la ferme n'ont pas attiré l'attention du dénonciateur mais Marcello Tari, si. Tari était présent au même G8 que Stone, qui l'a peut-être repéré à ce moment-là : comme Stone, Tari est un peu plus vieux que la moyenne."

Quels furent les liens entre Mark Stone et la DCRI (Direction centrale du renseignement intérieur, issue de la fusion entre les RG et la DST) ? En février 2011, L'Express apporte une nouvelle information sur les activités de Stone en France. Dans un court article, le magazine avance qu'il a informé des policiers français sur Tarnac : "C'est en partie grâce à lui que la DCRI a pu reconstituer les déplacements à l'étranger de Coupat." Sans rien dire de plus.

Un mois plus tôt, dans le quotidien anglais The Daily Mail, Stone avait délivré un indice : "Je ne serais jamais allé à l'étranger sans l'accord de mes supérieurs et de la police locale."

Ses explications concordent avec celles du rapport d'inspection de la police anglaise, rendu public en février 2012. Selon ce rapport, "Mark Kennedy a visité ou servi dans onze pays, à plus de quarante occasions, dont quatorze visites en Ecosse. La National Public Order Intelligence Unit (responsable de Stone - ndlr) concluait des accords avec les pays hôtes pour les déplacements de Mark Kennedy à l'étranger."

Quelques jours après la remise du rapport, le Home Office (équivalent du ministère de l'Intérieur) développe : "Tous les déplacements de Mark Kennedy étaient autorisés par le Royaume-Uni, avec l'accord des Etats concernés et un soutien du pays hôte. (...) L'autorisation de déplacement était négociée et facilitée par le réseau approprié d'officiers de liaison." Accord du pays hôte, c'est-à-dire de la France et de ses autorités. Mais il sera difficile d'en savoir plus.

A Scotland Yard, à Londres, on ne veut rien nous dire : "Nous ne communiquons pas sur les policiers infiltrés, qu'ils soient toujours en mission ou pas." A Paris, la DCRI a refusé de répondre à nos questions. Quand nous contactons Stone, en septembre 2011, il se dit prêt à témoigner : "Vous rencontrer et discuter de votre article pourrait m'intéresser", nous répond-il par mail. Mais au final, il ne donne jamais suite.

"Un policier infiltré étranger, c'est plus sûr qu'un indic"

Un lieutenant de police, qui veut rester anonyme, revient sur la collaboration entre Mark Stone et la DCRI. Il nous explique qu'un officier français, chargé des mouvements altermondialistes et des contre-sommets à la Section contestation et violences des RG, gérait les infos fournies par Stone.

Début 2007, précise notre source, l'officier montre à ses collègues la photo d'un homme posant devant une tente et le décrit comme un policier anglais infiltré avec qui il travaille. Ses collègues sont heureux de l'apprendre : "Un policier infiltré étranger représente une source de grande qualité, explique le lieutenant. C'est plus sûr qu'un indic : il ne craint pas de trahir ses copains, il s'oriente où on le lui demande." Selon le policier, Mark Stone pouvait informer les Français de deux façons.

"Soit il avait un officier traitant à la Section traitement du renseignement qui le rencontrait et faisait passer ses infos à la Section contestation et violences ; soit il envoyait ses rapports à sa hiérarchie en Angleterre, qui transmettait tout renseignement utile à la France par le biais de la Division des relations internationales des RG."

Stone aurait aussi renseigné la DST (Direction de la surveillance du territoire). Cette fois, l'homme qui nous l'affirme est un haut fonctionnaire du ministère de l'Intérieur de l'époque. Il suivait de près le dossier de Tarnac.

"Un policier de la DST m'a révélé que Mark Stone les informait. Selon lui, les services secrets anglais ont prévenu la DST que leur agent travaillait sur le territoire français. Par politesse, ils ont proposé à la DST de bénéficier de ses informations. Un officier traitant français, de la Sous-direction du contre-terrorisme, lui a été affecté et le débriefait régulièrement."

De quoi parlait Stone à son officier français ? "Selon mon contact à la DST, Stone était considéré comme un très bon spécialiste de l'ultragauche européenne. Les services français voient cette mouvance comme une nouvelle menace terroriste depuis 2005 environ. En matière de terrorisme, aucun renseignement n'est anodin."

A l'époque, la moindre info sur les voyages à l'étranger des militants de Tarnac peut renforcer le soupçon d'une conspiration extrémiste et violente. "En 2008, la DCRI avait besoin d'un acte fondateur pour prouver son efficacité dans la lutte antiterroriste. Alain Bauer et Michèle Alliot-Marie avaient souscrit à la possibilité d'un attentat d'extrême gauche sur le sol français. Tarnac leur a fourni l'occasion qu'ils cherchaient pour frapper un grand coup."

"Une violation grave de la notion de procès équitable"

Pour l'un des avocats du groupe de Tarnac, William Bourdon, la contribution de Mark Stone à l'enquête française pose problème.

"Si c'est avéré, c'est aussi grave que les écoutes téléphoniques effectuées à Tarnac avant toute procédure judiciaire. La façon dont la police obtient ses preuves doit être encadrée. On dévoie la notion de terrorisme pour obtenir des preuves que l'on ne pourrait jamais utiliser dans d'autres affaires. Les services de renseignement possèdent probablement un dossier bien plus épais que le dossier judiciaire. Mais il n'a pas été dévoilé aux avocats de la défense. C'est une violation grave de la notion de procès équitable."

En 2010, après les mises en examen dans l'affaire de la SNCF, Stone continue de fréquenter les proches de la bande de Tarnac. Il passe plusieurs jours en Allemagne chez une militante antinucléaire soupçonnée d'avoir commis des sabotages sur des voies de chemin de fer dans son pays plusieurs années auparavant. Elle connaît Julien Coupat. Le juge d'instruction, Thierry Fragnoli, s'est déjà intéressé aux liens du groupe de Tarnac avec des militants allemands.

Fin 2010, Stone envoie un mail à l'anarchiste américain qui l'avait mis en contact avec les Français. D'après un mis en examen de Tarnac, Stone questionnait son ami sur les projets des Français pour le G8 de Deauville prévu en mai 2011. L'Américain, qui aujourd'hui ne veut plus entendre parler de cette histoire, n'a jamais eu le temps de lui répondre : Mark Stone a été démasqué quelques jours plus tard.

Dans les autres pays européens où Stone a travaillé, l'affaire a fait scandale. En Angleterre, son rôle d'agent provocateur, établi par la justice, a fait annuler deux procès d'activistes. La police anglaise a subi huit enquêtes différentes au sujet de Stone/Kennedy, entraînant des réformes dans l'organisation des services.

Le sujet est d'autant plus sensible qu'il a été reproché au policier d'avoir entretenu des relations sexuelles et amoureuses avec certaines militantes à l'insu de ses supérieurs. "Quelque chose a très mal tourné", a déclaré le ministre de l'Intérieur britannique. Sans oublier que l'affaire Kennedy, en éveillant la méfiance des activistes et des journalistes, a permis à ceux-ci de démasquer huit autres policiers infiltrés dans les milieux d'extrême gauche.

Allemagne, Irlande, Islande

En Allemagne, où Stone a habité de longues périodes chez des militants anarchistes et antifascistes, la gauche parlementaire a mitraillé le gouvernement de questions. Savait-il ? Stone a-t-il enfreint la loi ? La police cautionnait-elle ? Le gouvernement refuse de répondre aux parlementaires.

Le 26 janvier 2011, le quotidien britannique The Guardian révèle, sans être démenti, le contenu d'une réunion à huis clos au Bundestag. Le chef de la police fédérale, Jörg Zierke, affirme que Stone a été invité en Allemagne pour infiltrer le mouvement antifasciste. Il a ainsi travaillé sous contrat pour trois länder, lors de cinq visites entre 2004 et 2009. L'agent anglais a commis au moins deux délits, dont un incendie volontaire, mais les poursuites ont été abandonnées. "La police ne peut s'attaquer aux réseaux internationaux organisés et conspiratifs qu'en agissant de manière internationale et conspirative", justifie le chef de la police allemande.

En Irlande, un responsable travailliste a demandé cinq fois au ministre de la Justice de clarifier les activités de l'agent sur le territoire. Stone est soupçonné de s'être attaqué, avec d'autres militants, à des policiers irlandais pendant un sommet de l'UE à Dublin.

En Islande enfin, le ministre de l'Intérieur a ouvert une enquête. Stone aurait mis en relation des militants et leur aurait enseigné des techniques de résistance non violente et de blocage des routes. Partout, l'affaire déclenche des débats parlementaires, remet en cause des enquêtes policières ou provoque de nouveaux procès. Sauf en France. Pourtant, en 2009, Stone s'est rendu à Strasbourg dans trois réunions préparatoires du contre-sommet de l'Otan. Nul ne se demande si là-bas, comme dans d'autres villes d'Europe, l'infiltré anglais a encouragé des violences.

Camille Polloni

*le prénom a été modifié

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Message  niouze Lun 28 Jan - 13:35

Suisse
Nestlé condamné pour avoir espionné les altermondialistes

Par Agnès Rousseaux (28 janvier 2013)



Dix ans après les faits, la justice suisse a condamné le 25 janvier la multinationale Nestlé et la société de surveillance Securitas pour espionnage et infiltration du mouvement altermondialiste Attac. Les deux sociétés devront verser 3 000 francs suisses (2 400 euros) pour préjudice moral à chacun des plaignants, notamment les huit auteurs du livre Attac contre l’Empire Nestlé, publié en 2004. Le tribunal civil de Lausanne a ainsi reconnu l’infiltration dans le groupe des auteurs de deux employées de Securitas, sur mandat de Nestlé. Celles-ci ont assisté à des réunions, obtenu des informations confidentielles et des détails sur la vie privée des auteurs, et rédigé des rapports à l’attention de la multinationale.

Une procédure pénale avait été lancée par Attac en 2008, après la révélation de cette affaire par la Télévision suisse romande. Attac a dénoncé les « lacunes béantes » de ce procès, qui a abouti à un non-lieu en 2009. Un livre, Affaire classée. Attac, Securitas, Nestlé, d’Alec Feuz, a pointé les nombreuses zones d’ombre de ce verdict. Le juge d’instruction affirmant notamment l’impossibilité matérielle pour les agents de police judiciaire de procéder à une perquisition des locaux de Nestlé. Ce juge – devenu depuis chef de la police cantonale – avait par ailleurs estimé au début de l’instruction qu’il n’y avait « aucune raison de douter de la bonne foi de Nestlé et de Securitas ».

Attac Suisse s’est déclarée très satisfaite de cette condamnation au civil. Quant à la multinationale Nestlé, elle a rappelé que « l’incitation à l’infiltration est contraire aux principes de conduite des affaires du groupe ». Qui a pourtant été impliqué dans d’autres affaires d’espionnage de groupes militants, en Suisse.
http://www.bastamag.net/article2904.html

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Message  niouze Mar 5 Fév - 15:01


à lire sur guardian.co.uk (en anglais) 04/02/2013 à 10h53
Des policiers sous couverture utilisaient l’identité d’enfants morts



Pendant trente ans, des policiers sous couverture ont utilisé l’identité d’enfants morts pour infiltrer des groupes d’activistes, révèle le Guardian.

Les policiers de la Special Demonstration Squad (Brigade spéciale des manifestations) auraient utilisé ces identités pour avoir une histoire crédible et éviter d’être démasqués par les groupes qu’ils infiltraient – parmi lesquels des activistes anticapitalistes, des défendeurs des droits des animaux et de violents militants d’extrême-droite.

L’un des policiers raconte avoir eu l’impression de « piétiner la tombe » de l’enfant, mort à l’âge de 4 ans. Pour être plus crédible, il avait visité le village natal de l’enfant et affirment que les policiers visitaient les maisons où ils étaient supposés être nés.

« Ce sont ces petits détails qui sont importants – l’odeur bizarre qui vient de l’évier cassé depuis des années, là où est le bureau de poste du coin, le numéro de bus que tu prends pour aller d’un endroit à un autre. »

Un autre considère néanmoins que la méthode était justifiée par « l’intérêt supérieur » (« greater good »).

Un troisième policier, John Dines, était en couple avec l’une des activistes pendant deux ans avant de disparaître de sa vie. En essayant de retrouver son amant disparu, la femme a trouvé son certificat de naissance et a tenté de retrouver sa famille, sans succès. « Ça aurait été horrible », dit-t-elle.
http://www.rue89.com/2013/02/04/des-policiers-sous-couverture-utilisaient-lidentite-denfants-morts-239272
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Message  ivo Jeu 28 Fév - 11:22

Les radars mobiles de nouvelle génération, destinés à lutter contre les grands excès de vitesse, vont entrer en vigueur à partir du 15 mars dans une vingtaine de départements, a annoncé jeudi 28 février la Sécurité routière. Ces nouveaux radars embarqués à bord d'un véhicule banalisé qui se mêle à la circulation seront capables de photographier, sans flash et en roulant, tous les véhicules en grand excès de vitesse. Ils ont vocation à remplacer progressivement les radars ancienne génération déployés entre 2004 et 2005.
>>>
http://www.huffingtonpost.fr/2013/02/28/les-nouveaux-radars-mobiles-vebaliser-partir-15-mars_n_2779444.html?utm_hp_ref=france
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Message  ivo Lun 11 Mar - 12:39

"Captation de données informatiques", "sonorisation des ordinateurs", "cheval de Troie", "keystroke logger" : derrière ces termes juridiques ou informatiques, un dispositif antiterroriste de pointe, inscrit dans la loi, est aujourd'hui au point mort.

Votée en 2011 et étoffée l'an dernier, la loi LOPPSI 2 autorise les enquêteurs antiterroristes à placer, directement ou à distance, des logiciels de type "cheval de Troie" sur les ordinateurs de suspects sous le contrôle d'un juge d'instruction. Un dispositif limité aux affaires de terrorisme, de criminalité et de délinquance organisées.
L'avantage de ces logiciels espions, selon les juges et les enquêteurs, est de capter en temps réel tout ce que le suspect frappe sur son clavier avant l'éventuel cryptage des données. Une façon de connaître instantanément le contenu d'un mail, d'un texte, d'un "chat" suspect évoquant par exemple un projet d'attentat, sans avoir à attendre de longues semaines ou des mois pour décrypter des conversations.
>>>
http://www.franceinfo.fr/justice/l-un-des-volets-de-la-lutte-antiterroriste-au-point-mort-916109-2013-03-10

Loppsi 2 - Sécurité intérieure
>>>
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl09-292.html
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Message  ivo Mer 16 Oct - 9:10

La Belgique piège deux chefs pirates somaliens avec un faux film
Deux pirates somaliens parmi les plus importants ont été arrêté à leur descente d'avion, samedi à Bruxelles, à l'issue d'une opération d'infiltration sans précédent de la justice belge. Les deux hommes croyaient en effet se rendre en Belgique pour participer à la réalisation d'un "film sur la piraterie".
>>>
http://www.franceinfo.fr/justice/la-belgique-piege-deux-chefs-pirates-somaliens-avec-un-faux-film-1178081-2013-10-15
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Message  ivo Jeu 4 Fév - 11:40

Le drone, nouvelle arme des gendarmes
Maintien de l'ordre, police judiciaire, sécurité routière... la gendarmerie nationale va mettre en service dès le mois prochain une flotte de microdrones susceptibles de remplir un large éventail de missions.
>>>
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2016/02/03/01016-20160203ARTFIG00360-le-drone-nouvelle-arme-des-gendarmes.php
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